Située à 46 km à l’ouest de la ville de Korhogo, le village de Koumbolokoro est sous ménace depuis plusieurs années, due à l’opposition d’une grande partie de la population villageoise contre les orpailleurs clandestins. Une opposition qui a fait trois morts et plusieurs victimes dont le récent assassinat du jeune Soro Nerguerdenin Désiré (23 ans), retrouvé mort et mutilé dans son champ dans l’après-midi du lundi 9 septembre 2024.
Ce vendredi 20 septembre 2024, nous nous sommes rendus sur les lieux aux environ de 10h30, après plus de 600 km de voyage, Koumbolokoro, nous y sommes.
Le village un peu déserte due à la situation que vit les habitants à cause de l’interdiction de l’orpaillage qui ne cesse d’endeuiller des familles.
Tout à commencer il y a trois ans, lorsque l’ancien chef du village, Yéo Fatogoman (2017-2022) et son président des jeunes Tuo Songuilena ont désisté à la lutte contre l’orpaillage dans le village pour se ranger du côté des clandestins orpailleurs. L’ancien chef du village sans concerter tout le village, imposa l’orpaillage.
La population vivait dans cette opposition jusqu’à ce que les jeunes du village arrêtent vingt orpailleurs clandestins le 8 janvier 2024 envoyé par un certain Traoré Dramane, ces derniers ont été aussitôt libérés par la gendarmerie de Niofoin sous prétexte qu’ils auraient « l’autorisation de la part de l’État » pour extraire l’or sans l’accord de la chefferie du village, chose que la population du village condamne et s’oppose envoyant des courriers aux autorités de la région de Korhogo.
Dans la cour du Chef de terre sous l’ombre du baobab du village, tous étaient présent pour répondre à toutes nos questions.
M. Soro Jérémie, un chef de quartier du village de Kombolokoro : « Si on détruit la terre, qu’est-ce qui va nous servir à nourrir nos enfants ? Sachant que les enfants se développent très vite de nos jours, la population et nous avons plusieurs fois organisé des réunions pour dire un grand NON à l’orpaillage dans ce village. On a multiplié les courriers pour envoyer aux autorités de la région de Korhogo ça vaut un an maintenant et on a toujours pas reçu de réponse. On ne veut pas créer un drame voilà pourquoi jusque là on est très calme …»
Le chef de terres de Kombolokoro : « je refuse l’orpaillage sur les terres de Kombolokoro, en tant que chef de terre, ma décision est que la jeunesse doit cultiver la terre pour se nourrir et nourrir les générations futures ; alors que l’Etat nous vienne en aide pour arrêter ces activités clandestines. »
Le porte-parole de la jeunesse de Kombolokoro, Soro David, quant à lui, fait l’état des lieux et s’inquiète pour la sécurité du village : « Nous-même, notre vie est en danger, ils ont assassiné le petit parce qu’il est le petit frère de Zié Soro Samuel qui est président de la mutuelle du Village, moi-même j’ai été aussi menacé de mort par ce Tuo Songuilena. A cette heure, franchement dire, malgré la présence des forces de sécurité dans le village, notre sécuritéest en danger.
Tout le monde a peur d’aller au champ pour honorer la saison des récoltes, actuellement on se nourrit des récoltes de la précédente saison. Il faut que les forces de l’ordre arrêtent définitivement les coupables qui sont toujours libre afin que nous puissions vaquer à nos occupations en toute tranquillité et on est obligé de fermer nos portes à 20h avec le couvre-feu. C’est difficile mais on fait avec pour l’instant. »
Absent de la réunion, nous avons essayé d’interroger les membres de la famille de l’ancien chef du village dans sa cour, mais ses proches nous ont repoussé.
Une opposition qui causa l’assassinat et l’arrestation des proches depuis le mois d’août du président de la Mutuelle pour le Développement de Koumbolokoro (MuDeK), M. Zié Soro Samuel, lui aussi plusieurs fois menacé de mort par des personnes qui soutiennent les orpailleurs clandestins avec à leur tête, un certain Diako.
Le président de la mutuelle s’indigne : « Mon bureau et moi avons écrit plus de six fois aux autorités pour cette histoire. Le 29 août 2024, ces gens qui soutient l’orpaillage m’ont poursuivi à Korhogo comme si c’était dans un film western jusqu’à ce qu’on se retrouve au commissariat de police.
Ils ont expliqué qu’ils veulent faire l’orpaillage et qu’ils auraient la caution de plusieurs autorités et que nous nous opposons et qu’on sera tous assassinés. Ils ont été arrêtés et ensuite libérés à mon insu. Puisque j’ai échappé à leur assassinat le ce même jour, ils ont dit ouvertement et même au village en collaboration avec certains complices au village. Ils ont affirmé que j’ai échoué mais ils vont commencer à assassiner tous ceux qui s’opposent à l’orpaillage surtout mes petits frères, et voilà comment il (Désiré) a été suivi au champ. Il a été abattu avec le fusil au visage, des parties intimes emportées et ils ont ainsi pris le corps en otage jusqu’à ce que la gendarmerie arrive. Nous avons porté plainte pour que les autorités compétentes puissent régler cette affaire puisque nous avons Foi à la justice. Nous nous confions à la justice.
C’est absurde parce que nous n’avons pas compris que ceux qui sont les assassins viennent librement prendre de la bière au village pendant que la gendarmerie arrête 4 des innocents. Ce sont mes neveux qu’ils ont mis en prison. Deux sont en classe de troisième, un en terminal et puis l’autre qui est un apprenti maçon. La gendarmerie vient, les ramasse, parce que certainement quelqu’un leur a dit, on a fini d’assassiner l’autre mais voilà ses neveux. Il faut qu’on les prenne pour que ça soit un truc de pression. Je ne sais pas si c’est en monnaie d’échange de telle sorte que ça soit qu’on retire la plainte qu’on a apporté. Donc c’est le chef de terre bien évidemment qui a porté plainte et pas nous. Mais nous en tant que parents nous nous joignons au chef de terre pour porter plainte afin que cette situation soit réglée parce qu’ils ont pris une mesure et nous pensons que nous sommes dans un État de droit où on ne peut pas se lever un matin assassiner quelqu’un et puis ça ne va pas quelque part. On se lève un matin, on poursuit quelqu’un en plein centre-ville, les complices sont arrêtées et puis libérer ça ne va pas quelque part. Et à la suite on continue d’assassiner et ça ne va pas quelque part et donc, comme la justice est là, nous pensons qu’elle va faire son travail et nous nous confions à la justice et à la justice de Dieu. » s’est indigné le président de la MuDeK, M. Zié Soro Samuel, après avoir reçu ses quatre neveux à son domicile cet après-midi suite à leur libération de prison.
En conclusion, aux dits d’une partie de la population, elle s’oppose à l’orpaillage dans leur Koumbolokoro, car depuis très longtemps, les responsables du village ont toujours refusé l’orpaillage malgré la richesse de ses terres, pour eux, cette activité détruit la terre, une terre qui est pour eux un trésor et un héritage qui pourra être entretenu de génération en génération et pour cela ils appellent l’Etat afin de mettre la main sur les assassins, sécurisé le village et mettre fin voire interdire l’orpaillage sur les terres de Kombolokoro, terres de guerriers.
Jaurès DROHGBA, envoyé spécial à Koumbolokoro
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